Mémoire, Histoire & Culture Militaire

Une application géolocalise les tombes des soldats Morts pour la France : « c’est l’occasion de connaître l’histoire de ces gens »

Depuis 2016, l’application mobile Géomémoire, développée par l’association Le Souvenir français, répertorie et géolocalise les tombes des civils et des militaires qui ont le statut officiel de « Mort pour la France ». 2 778 sépultures ont déjà été référencées dans 91 cimetières dont 75 dans 7 cimetières des Hauts-de-France. Le dernier en date est celui de Venette dans l’Oise.

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C’est une mention inscrite sur nombre de monuments aux morts et de sépultures. Mort pour la France. Une mention honorifique posthume officielle ajoutée à l’état civil d’une personne, civile ou militaire, qui reconnaît son sacrifice pour la France en tant de guerre. Une mention attribuée à 1,5 million de personnes en France qui donne des droits à la victime et à sa famille. Parmi lesquels celui d’avoir une sépulture individuelle et à vie pour les soldats.

Les civils décédés suite à un fait de guerre voient, eux aussi, leur nom inscrit sur le monument aux morts de leur commune de naissance ou de celle de leur dernier domicile. En matière de sépulture, c’est moins simple : « Dans les cimetières communaux, les Morts pour la France sont inhumés soit dans une tombe individuelle, soit dans une tombe familiale. Dans les deux cas, la stèle porte la mention Mort pour la France, explique Xavier Hercheux, vice-président de la section de l’Oise de l’association Le Souvenir français. Quand il s’agit d’une tombe individuelle, il n’y a pas de souci : le Mort pour la France y restera ad vitam æternam et sa tombe sera entretenue. Lorsqu’il s’agit d’une tombe familiale, c’est plus complexe parce que les communes sont souvent confrontées au manque de place dans les cimetières. Et quand la commune a besoin de place, il est fréquent que, par manque de connaissance, elle dépose les os d’une tombe qu’elle veut récupérer dans une fosse commune. Y compris ceux des morts pour la France. Le but du Souvenir français, c’est de sauvegarder ce patrimoine funéraire.« 

Sauvegarder et entretenir les tombes des Morts pour la France, civils comme militaires, partout dans le monde. Mais aussi transmettre la mémoire de ceux qui ont sacrifié leur vie pour leur pays, notamment auprès du jeune public. C’est la vocation de cette association mémorielle, créée après la guerre de 1870 et reconnue d’utilité publique en 1906.

Et pour mieux transmettre le souvenir à une époque où le digital est partout, rien de mieux qu’une application pour smartphone. Géomémoire a vu le jour en 2016. Son objectif est de recenser, dans tous les cimetières de France et du monde, les tombes portant la mention « Mort pour la France » et de raconter l’histoire de ceux qui s’en sont vus honorés.

Via ce QR, il est possible de télécharger l’application Géomémoire développée par l’association Le Souvenir français.

© Xavier Hercheux

S’il est aisé de trouver les noms de tous les Morts pour la France sur internet, il ne s’agit que d’une liste, avec un nom, une date de naissance et une date de décès. Le plus de Géomémoire, c’est de leur redonner vie. « Si, par exemple, vous faites des recherches généalogiques sur un de vos aïeux qui est mort pour la France, que vous ne pouvez pas vous déplacer au cimetière et que vous n’avez pas accès facilement sur internet aux informations le concernant, l’application va vous donner la photo de la sépulture, le contexte dans lequel il est décédé. C’est-à-dire qu’il n’était peut-être pas soldat, mais qu’il est quand même mort au combat, explique Xavier Hercheux. Sa fiche dans l’application va vous indiquer qui il était, où il vivait, ce qu’il faisait. Parfois, on arrive à retrouver des photos d’archives, voire du son ou de la vidéo du Mort pour la France. Et quand on retrouve ça, on l’intègre dans sa fiche.« 

Une autre utilisation de Géomémoire est possible, notamment pour les touristes : en flashant le QR code apposé à l’entrée d’un cimetière et proposant de télécharger l’application, les fiches des Morts pour la France inhumés sur place ainsi que l’emplacement de leur sépulture s’affichent sur une carte des lieux. Vous pouvez ensuite vous arrêter sur chacune de ces tombes en suivant le GPS intégré et lire la fiche de renseignement du défunt.

Le QR Code de l’application Géomémoire à l’entrée du cimetière de Venette.

© Xavier Hercheux

Les fiches individuelles sont réalisées par des généalogistes spécialisés dans les recherches historiques et les bénévoles de l’association, dont fait partie Xavier Hercheux. « Mon travail à moi, c’est de localiser la tombe sur place, de voir si elle est entretenue et de recenser les éléments avec l’état civil de la commune, énumère-t-il. Il faut notamment vérifier si la personne est bien inhumée dans la tombe. Parce que parfois, on a des surprises : on a un nom sur une tombe et la personne n’est pas dedans, mais dans le cimetière le plus proche du lieu où elle est décédée. Tout ce travail, fait en amont, est ensuite transmis au siège de l’association et ce sont les généalogistes qui prennent le relais. Les données sont enrichies avec des archives militaires qui ne sont pas accessibles au grand public. Toutes les infos sont vérifiées et lorsqu’une information n’est pas sûre, elle ne figure pas dans la fiche du mort pour la France. »

Pour que les tombes des Morts pour la France soient répertoriées dans Géomémoire, le Souvenir français passe une convention avec la commune, propriétaire des cimetières communaux. Depuis le lancement de l’application en 2016, 91 cimetières et 2 778 sépultures ont été géolocalisés. Dont respectivement 7 et 75 dans les Hauts-de-France. Le dernier cimetière en date référencé est celui de Venette dans l’Oise.

On y compte 35 Morts pour la France : 21 inhumés dans des tombes familiales et 14 déplacés dans un mémorial dédié.

« On en a déjà fiché dix. On aurait pu faire les 35 d’un coup, mais ça a un coût pour la mairie : chaque fiche coûte 60 euros. Ça paie le travail des généalogistes et la mise des données dans l’application, précise Xavier Hercheux. À Venette, pour lisser le prix, on intervient sur trois ans. Au cimetière de Margny, il y a 106 tombes de Morts pour la France recensées. Des recherches sont en cours pour d’autres sur ce cimetière. On en a également fiché dix. La mairie va nous les faire faire en deux ans. Et la géolocalisation du cimetière de Crépy-en-Valois est finie depuis 2016.« 

60 euros par fiche, un coût qui n’a pas effrayé Romuald Seels, le maire (SE) de Venette. S’il a engagé la commune dans cette démarche il y a plus d’un an, c’est parce que, pour la municipalité, le devoir de mémoire, « c’est une valeur qu’on veut transmettre auprès des enfants parce que ça a du sens, explique-t-il. On a toujours imaginé qu’il fallait avoir ce devoir de mémoire auprès de ceux qui se sont battus pour la France. Et c’était l’occasion d’aller plus loin, c’est-à-dire de connaître l’histoire de ces gens. Et puis il y a encore des gens dans la commune qui portent le nom d’un Mort pour la France. Il ne faut pas oublier qu’on a envoyé à l’époque des enfants de la commune au combat. Et nous, on a ce rôle de faire perdurer leur souvenir. C’est même plus qu’un rôle, c’est une obligation. C’est une question de respect.« 

Les généalogistes du Souvenir français travaillent actuellement à la rédaction de 87 nouvelles fiches de Morts pour la France, inhumés dans les cimetières de Margny-les-Compiègne et de Coudekerque-Branche.



Auteur : Jennifer Alberts

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Cédric

Depuis 1998, je poursuis une introspection constante qui m’a conduit à analyser les mécanismes de l’information, de la manipulation et du pouvoir symbolique. Mon engagement est clair : défendre la vérité, outiller les citoyens, et sécuriser les espaces numériques. Spécialiste en analyse des médias, en enquêtes sensibles et en cybersécurité, je mets mes compétences au service de projets éducatifs et sociaux, via l’association Artia13. On me décrit comme quelqu’un de méthodique, engagé, intuitif et lucide. Je crois profondément qu’une société informée est une société plus libre.

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