Analyse Stratégique & Géopolitique

Retour sur le colloque Mobilisation(s) – L’IHEDN : Institut des hautes études de défense nationale

Dans des sociétés européennes anesthésiées par un temps de paix, il s’agit d’abord de réparer les armées et surtout, d’amorcer une véritable remontée en puissance. Il existe une triple dimension : militaire bien évidemment, mais aussi économique – avec la problématique de l’économie de guerre – et le renouveau des forces morales de la nation dans son ensemble – ce qui sous-entend d’évaluer avec attention le degré d’acceptabilité des mesures requises.

Sur la dimension militaire, comme l’a souvent rappelé le chef d’état-major des armées, il faut « gagner la guerre avant la guerre », ce qui invite à une triple mobilisation. Mentale d’abord, en anticipant nos besoins, en définissant au mieux nos modèles d’armée, et en planifiant face aux menaces majeures. L’OTAN est l’un des acteurs centraux de cette préparation, en lien avec les nations. La mobilisation physique, ensuite : pour les armées françaises, c’est démontrer nos capacités avérées à opérer avec nos alliés et partenaires, et à être projetées rapidement. Enfin, cette mobilisation doit aussi être multilatérale surtout à l’heure où la posture et le soutien américain sont interrogés ; l’heure d’un véritable pilier européen au sein de l’Alliance semble arriver, avec de nécessaires efforts pour surmonter la disparité des visions et l’inégale répartition des forces entre États.

La dimension industrielle n’a pas moins d’importance. Le concept d’économie de guerre apparaît par bien des aspects ambiguë, même s’il a l’atout de fédérer les industries de défense autour d’une dynamique commune. Pour un industriel, le principal écueil reste l’absence d’une hiérarchisation claire de nos priorités et de nos moyens. Si on doit saluer la loi de programmation militaire 2019-2025 qui a été respectée, elle n’a pas permis de dépasser le strict format prévu. Seule une intensification des investissements, de la logistique et de la productivité pourra inverser la tendance. Au rang des priorités, plusieurs ressources : humaines d’abord, avec un effort sur la jeunesse. Ressources financières ensuite, avec cette menace que fait peser la dette sur notre souveraineté. Enfin, les ressources énergétiques, numériques et autour de l’intelligence artificielle requièrent également une attention soutenue.

Le dernier défi s’apparente à un sursaut moral. Pour les opinions publiques, notamment à l’échelle européenne, ce retour de la guerre est diversement vécu. La proximité et la nature de la menace varient suivant qu’on se trouve à Riga ou à Lisbonne. L’Union européenne, si elle s’est saisie de cette dimension récemment, paie des décennies où la question de la défense était absente ou très largement minorée. Pourtant, on peut souligner des efforts importants et une accélération, traduites dans les nombreux programmes lancés afin de soutenir concrètement l’Ukraine dans son combat comme ASAP – le programme destiné à livrer plus de munitions.

Auteur : tanguy.morel@ihedn.fr

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Cédric

Depuis 1998, je poursuis une introspection constante qui m’a conduit à analyser les mécanismes de l’information, de la manipulation et du pouvoir symbolique. Mon engagement est clair : défendre la vérité, outiller les citoyens, et sécuriser les espaces numériques. Spécialiste en analyse des médias, en enquêtes sensibles et en cybersécurité, je mets mes compétences au service de projets éducatifs et sociaux, via l’association Artia13. On me décrit comme quelqu’un de méthodique, engagé, intuitif et lucide. Je crois profondément qu’une société informée est une société plus libre.

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