« Poutine est devenu complètement fou » : derrière les déclarations de Trump, un cessez-le-feu en Ukraine toujours plus improbable – L’Humanité
Les convergences idéologiques et matérielles de Donald Trump et Vladimir Poutine se heurtent régulièrement à la réalité du terrain de guerre qu’est devenu l’Ukraine. Si leur rapprochement – motivé par l’envie de remodeler ce qu’ils considèrent être une Europe hostile à leurs projets politiques – est loué par les deux chefs d’État, leur dissension sur le sort à réserver à Kiev continue de différer la résolution du conflit. Le locataire de la Maison Blanche a de nouveau illustré cette démarcation dimanche 25 mai, en estimant que Vladimir Poutine était « devenu complètement fou », après un week-end d’attaques russes meurtrières contre l’Ukraine malgré les appels au cessez-le-feu.
Le président états-unien affichait pourtant sa proximité avec son homologue, avec qui il a échangé pendant près de deux heures par téléphone, lundi 19 mai. Un appel duquel Donald Trump était sorti confiant quant à la quête d’une fin rapide de la guerre menée sur le territoire ukrainien. « Nous sommes de manière générale sur la bonne voie », avait de son côté affirmé Vladimir Poutine, qui louait un entretien « instructif et utile », selon l’agence de presse russe RIA.
Une attaque combinée de 367 projectiles
Les bombardements se sont pourtant intensifiés les jours suivants, avec notamment treize morts côté ukrainien, dimanche matin. Dans la nuit du dimanche 25 au lundi 26 mai, les autorités ukrainiennes ont fait état de deux blessés – une femme de 60 ans et un homme de 52 ans – dans une « attaque russe » dans la région de Zaporijjia, ainsi que de frappes dans les régions de Khmelnytski (ouest) et de « puissantes explosions » dans la ville de Kharkiv (nord-est).
À Kiev, le maire Vitali Klitschko a indiqué que la défense antiaérienne avait été activée face à une attaque de drones. Selon l’armée de l’air, l’Ukraine a subi, dimanche à l’aube, une attaque combinée de 367 projectiles : 69 missiles et 298 drones. Quelque 250 drones et 14 missiles balistiques avaient déjà été détectés dans la nuit de vendredi à samedi. L’armée russe a justifié ses attaques par sa volonté d’affaiblir le « complexe militaro-industriel » ukrainien. Côté russe, le fonctionnement de plusieurs aéroports moscovites a une nouvelle fois été perturbé dans la nuit, alors que différentes régions russes dont la capitale ont fait état de drones interceptés par la défense antiaérienne.
« J’ai toujours eu de très bonnes relations avec Vladimir Poutine mais quelque chose lui est arrivé, a estimé Donald Trump dans un message posté sur son réseau Truth Social. J’ai toujours dit qu’il voulait toute l’Ukraine, pas seulement une partie, et peut-être que cela se révèle juste mais s’il le fait, cela mènera à la chute de la Russie ! » Les bombardements russes du week-end ont poussé Kiev et ses alliés européens à appeler à punir Moscou. La cheffe de la diplomatie de l’Union européenne (UE), Kaja Kallas, a ainsi réclamé « la plus forte pression internationale sur la Russie », tandis que Berlin dénonce « un affront, y compris envers le président américain Donald Trump, qui a tant fait pour amener Poutine à la table des négociations ».
« Je n’aime pas ça et il ferait mieux d’arrêter »
Dans un autre appel du pied à Washington, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé que « le silence de l’Amérique et des autres ne font qu’encourager Poutine ». Mais le principal concerné reste évasif sur toute action concrète visant la Russie. Donald Trump préfère se concentrer sur le volet commercial du conflit et ne cesse de répondre « absolument » lorsqu’il est interrogé sur la possibilité de renforcer les sanctions américaines.
Surtout, le locataire de la Maison Blanche n’hésite pas non plus à critiquer le président de l’Ukraine. « Tout ce qui sort de sa bouche crée des problèmes, a-t-il lancé dans la soirée du dimanche 26 mai. Je n’aime pas ça et il ferait mieux d’arrêter. » En l’état, la situation continue donc de stagner, malgré les quelques avancées gagnées au fur et à mesure que les négociations se sont poursuivies.
Depuis mi-février, l’administration américaine de Donald Trump multiplie les appels à un cessez-le-feu et s’est rapprochée pour cela de Moscou, sans résultat probant pour l’heure. Si la perspective – poussée par Kiev et ses alliés – d’un cessez-le-feu « inconditionnel » de 30 jours pour permettre des discussions de paix s’estompe au fil des jours, les pourparlers directs entre Russes et Ukrainiens, lancés mi-mai à Istanbul, ont débouché sur un résultat tangible : un vaste échange de prisonniers, au format 1 000 pour 1 000.
L’opération s’est déroulée en trois jours, du 23 au 25 mai : 390 personnes revenues le vendredi, 307 le samedi, 307, et 303 le dimanche. La prochaine étape est maintenant entre les mains du Kremlin. La diplomatie russe avait indiqué, vendredi 23 mai, que Moscou travaillait sur un document exposant « les conditions d’un accord durable » pour régler le conflit, qui devait être transmis à Kiev une fois l’échange de prisonniers finalisé. La méfiance reste néanmoins de vigueur au vu des allers-retours constants de ces derniers mois.
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Auteur : Tom Demars-Granja
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