Analyse Stratégique & Géopolitique

Pour la France, la vente de missiles air-air Meteor à la Turquie est encore loin d’être acquise – Zone Militaire

La petite phrase du président turc, Recep Tayyip Erdoğan, n’aura pas manqué d’être relevée en Grèce. Le 7 février, après avoir eu un échange téléphonique avec son homologue français, Emmanuel Macron, au sujet de la décision de l’Union européenne de suspendre les sanctions visant la Syrie, il a affirmé que « l’intensification du dialogue » entre la France et la Turquie allait « contribuer positivement aux relations » entre les deux pays, lesquels ont « un potentiel de coopération dans de nombreux domaines, notamment dans l’industrie de défense ».

Ces dernières années, les relations à couteaux tirés entre Paris et Ankara ont en effet mis un terme aux rares projets que les deux capitales avaient l’intention de lancer en matière d’armement, en particulier dans le domaine de la défense aérienne. Pour autant, estimant que la France et la Turquie avaient tout intérêt à reprendre le dialogue, un rapport du Sénat a récemment plaidé pour une relance de la coopération militaire bilatérale, y compris au niveau industriel.

Il serait « particulièrement pertinent de procéder à une revue stratégique commune afin d’examiner les sujets d’intérêt communs et de signifier qu’une page a bel et bien été tournée », ont même fait valoir les cinq sénateurs à l’origine de ce rapport. Et cela alors que la France et la Grèce sont liées par un partenariat stratégique de défense, assorti d’une clause de défense mutuelle.

D’ailleurs, c’est ce qu’a rappelé Athènes au moment où la Turquie cherche à se procurer des missiles air-air de longue portée pour armer les quarante avions de combat Eurofighter EF-2000 / Typhoon dont elle négocie l’achat avec le Royaume-Uni.

Développé par MBDA dans le cadre d’une coopération européenne, le Meteor arme les vingt-quatre Rafale vendus par la France à la Grèce. Et cela permet à cette dernière de « verrouiller » la FIR [Flight Information Region] d’Athènes, laquelle fait l’objet d’un contentieux avec Ankara.

Or, pour que le Royaume-Uni puisse vendre des Meteor à la Turquie, il lui faut l’accord des autres pays ayant pris part à leur développement. Si l’Espagne, l’Allemagne et l’Italie n’y voient, a priori, pas d’objection, il en va autrement pour la Suède et, surtout, pour la France. Du moins en théorie… Car une rumeur avance qu’elle aurait fini par céder. Et cela a d’ailleurs valu à Mme Laurence Auer, l’ambassadrice de France en Grèce, d’être convoquée par Nikos Dendias, le ministre grec de la Défense.

À cette occasion, M. Dendias a demandé une « explication officielle » au sujet des « informations relatives à la vente de missiles Meteor à la Turquie par un consortium auquel participe la France » et fait savoir que la Grèce « s’oppose fermement à une telle perspective », laquelle ne serait « pas conforme » au partenariat stratégique franco-grec.

Lors d’une réunion informelle des chefs d’État et de gouvernement des États membres de l’Union européenne [UE], le 3 février, à Bruxelles, le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, a abordé cette question avec M. Macron.

« M. Mitsotakis a demandé des détails sur les négociations en cours entre la Turquie et le consortium européen de missiles MBDA, qui sont menées sous la médiation du Royaume-Uni », rapporte en effet le quotidien grec I Kathemirini, ce 8 février.

D’après ce dernier, M. Macron a « confirmé les discussions » avant de souligner « qu’aucun accord définitif n’avait été conclu avec la Turquie » et qu’un « accord avec la Turquie ne devait pas être considéré comme acquis ».

Deux jours plus tôt, des « sources diplomatiques françaises » avaient assuré auprès du même journal que la France souhaitait « renforcer » son partenariat stratégique avec la Grèce.



Auteur : Laurent Lagneau

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Cédric

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