Les membres de l’Otan se sont mis d’accord pour porter leurs dépenses militaires à 5 % de leur PIB d’ici 2035 – Zone Militaire
Lors du sommet de l’Otan organisé à Newport [Royaume-Uni] en 2014, soit peu après l’annexion de la Crimée par la Russie, les Alliés prirent l’engagement de porter leur dépenses militaires à 2 % de leur PIB d’ici 2025 et d’affecter une part de ces dernières – 20 % – à l’acquisition et/ou à la modernisation de leurs capacités.
Cependant, si certains membres de l’Alliance, notamment ceux les plus inquiets face à la menace russe, prirent les mesures nécessaires pour tenir cet objectif, d’autres estimèrent qu’il n’y avait pas péril en la demeure… et se gardèrent pas conséquent d’en faire autant, quitte à s’attirer les foudres du président Trump.
Ainsi, durant son premier mandat [2017-21], ce dernier n’eut de cesse de critiquer vertement l’Allemagne pour la faiblesse de ses dépenses militaires ainsi que pour sa participation au projet de gazoduc russe Nord Stream 2. La suite lui a donné raison… alors que son attitude à l’égard de Berlin fut maintes fois décriée.
En effet, la guerre en Ukraine aura été un électrochoc pour les pays européens. Et à commencer par l’Allemagne, qui a annoncé des investissements massifs au profit de ses forces armées, dans le cadre de « Zeitenwende » [« changement d’époque »]. Désormais, Berlin parle de porter ses dépenses militaires à 3,5 % de son PIB à l’horizon 2029. Et cela alors que le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, a prévenu que la Russie pourrait attaquer l’Otan d’ici cinq à huit ans.
Il n’est pas le seul à le penser. Le secrétaire général de l’Otan, Mark Rutte est sur la même ligne.
« Les Russes sont en train de reconstituer leurs capacités à un rythme effréné. Ils produisent actuellement des munitions à des niveaux que l’on n’avait plus vus durant ces dernières décennies. La Russie produit quatre fois plus de munitions que l’ensemble de l’Otan en ce moment même. […] Toute son économie est sur le pied de guerre. Le renseignement en sources ouvertes indique que d’ici 2027, 2030 ou 2032, elle pourrait être en mesure d’atteindre un niveau de puissance tel qu’elle pourrait tenter quelque chose d’insensé », a-t-il en effet déclaré lors d’une conférence de presse donnée à Bruxelles au côté de Petr Pavel, le président de la République tchèque, en mai dernier.
Par ailleurs, renouant avec la tentation qui était la leur dans les années 1980 [et qui avait été justifiée par Henry Kissinger dans les pages de Time Magazine], les États-Unis ne cessent de demander aux Européens de prendre leur défense en main [si possible avec des armes américaines… mais c’est une autre histoire] afin de leur permettre de s’occuper de leur principale préoccupation, à savoir la région Indopacifique. Cette exigence a été formulée d’une manière policée par les responsables démocrates… Elle l’est aujourd’hui d’une façon plus rude par M. Trump, pour qui les membres de l’Otan devraient porter leurs dépenses militaires non plus à 2 % mais à 5 % de leur PIB.
Lors du dernier sommet de l’Otan, qui vient de se tenir à La Haye [Pays-Bas], les trente-deux Alliés se sont alignés sur cet objectif. C’est en effet ce qu’indique la déclaration finale – sans doute la plus courte de l’histoire de l’Alliance, avec seulement cinq paragraphes – qu’ils ont cosignée, ce 25 juin.
Détail important, tant on nous dit que le président Trump serait tenté de remettre en cause l’article 5 du Traité de l’Atlantique-Nord, les Alliés ont d’abord rappelé leur « engagement indéfectible en faveur de la défense collective ». Et d’insister : « Forts de notre unité, nous restons fermement résolus à protéger le milliard de personnes vivant dans nos pays, à défendre le territoire de l’Alliance et à y préserver la liberté et la démocratie ».
Puis, pour notamment faire face « à la menace que la Russie fait peser pour le long terme sur la sécurité euro-atlantique » ainsi qu’à celle, persistante, du terrorisme, les Alliés sont donc convenus de « porter à 5 % la part du PIB consacrée chaque année au financement des besoins ayant trait à la défense proprement dite et aux dépenses liées à la défense et à la sécurité au sens large, afin d’honorer les obligations individuelles et collectives qui sont les leurs au titre de l’article 3 du traité de Washington ».
Dans le détail, les dépenses militaires stricto sensu devront représenter 3,5 % du PIB tandis que celles relatives à la protection des infrastructures critiques, à la préparation du secteur civil, à l’innovation et au renforcement des industries de défense seront portées à 1,5 % du PIB.
« La trajectoire et la répartition des dépenses fixées ici seront revues en 2029, à la lumière de l’évolution du contexte stratégique et du réexamen des objectifs capacitaires », est-il précisé dans la déclaration finale. À noter que la déclaration finale de fixe pas d’objectifs aux Alliés en matière de capacités et de contributions…
Au passage, cette dernière précise que, comme la sécurité de l’Ukraine se confond avec celle des Alliés, les « aides qui concourent directement à sa défense et au développement de son industrie de défense entreront dans le calcul des dépenses de défense » des pays de l’Otan.
Enfin, ces derniers ont aussi réaffirmé leur engagement à « développer rapidement la coopération entre les industries de défense de part et d’autre de l’Atlantique et à mettre les technologies émergentes et l’esprit d’innovation au service de [la] sécurité collective ». Ce qui passera, entre autres, par l’élimination des « obstacles qui freinent les échanges commerciaux entre Alliés dans le secteur de la défense ».
Auteur : Laurent Lagneau
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