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Le suédois Saab défie Boeing en proposant son avion d’alerte avancée S106 GlobalEye au Canada – Zone Militaire

Le Premier ministre canadien, Mark Carney, doit sans doute sa victoire aux dernières élections législatives à l’effet « drapeau », suscité par les propos du président Donald Trump sur l’éventualité que le Canada devienne le 51e État américain et surtout par la guerre commerciale qu’il venait de déclencher.

Durant la campagne électorale, ayant pris les rênes du gouvernement canadien après la démission de Justin Trudeau, M. Carney avait décidé de « reconsidérer » l’achat de 88 chasseurs-bombardiers F-35A auprès du constructeur américain Lockheed-Martin. Achat qui avait été décidé aux dépens du JAS-39 Gripen E/F de Saab, finaliste d’un appel d’offres lancé en 2020.

Cependant, cette fermeté affichée à l’égard des États-Unis ne pourrait durer qu’un temps. Déjà, même s’il se dit favorable à l’idée d’un rapprochement avec l’Union européenne [UE] en matière de défense, M. Carney a fait savoir que le Canada discutait « à haut niveau » d’une éventuelle participation au « Golden Dome », le projet de bouclier antimissile américain dont le lancement a été annoncé par M. Trump, la semaine passée.

En outre, dans un entretien accordé à l’agence Bloomberg, en marge du forum « Shangri-la Dialogue », Mme le général Jennie Carignan, cheffe d’état-major de la défense canadienne, a réaffirmé l’importance des relations militaires entre Ottawa et Washington.

« Du point de vue de la défense et sur le plan militaire, je collabore très étroitement avec mes homologues américains », a-t-elle dit. « Nous sommes absolument déterminés à défendre notre pays et la région arctique aux côtés de nos voisins » car « nous ne pouvons pas changer notre géographie », a-t-elle insisté.

Cela étant, les chances de voir l’Aviation royale canadienne renoncer au F-35A au profit du JAS-39 Gripen E/F sont minimes car les 16 premiers exemplaires ont déjà été payés et qu’il n’est pas dans ses habitudes d’entretenir deux flottes différentes d’avions de combat. Même chose pour les drones MQ-9B SkyGuardian de General Atomics et les 16 avions de patrouille maritime P-8A Poseidon commandés à Boeing.

En revanche, la défiance exprimée par M. Carney avant sa victoire aux élections législatives pourrait favoriser Saab pour le choix du futur avion d’alerte avancée destiné à l’Aviation royale canadienne, laquelle n’a jamais disposé d’une telle capacité.

La décision d’acquérir des avions pour assurer l’alerte avancée et le commandement aéroporté [AEW&C], pour 5,5 milliards de dollars canadiens [CAN], a été annoncé lors de la publication du document d’orientation stratégique « Notre Nord, fort et libre : Une vision renouvelée pour la défense du Canada », en avril 2024.

Compte tenu de la participation du Canada au Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord [NORAD], le choix de l’avion E-7A Wedgetail de Boeing, également fait par l’US Air Force, la Royal Air Force et l’Otan paraissait évident… Sauf que Saab est bien décidé à jouer le trouble-fête.

En effet, associé au constructeur local Bombardier, qui fournit l’avion d’affaires Global 6000/6500, Saab a fait savoir qu’il avait l’intention de soumettre la candidature de son système S106 GlobalEye à l’appel d’offres que devrait lancer le gouvernement canadien.

« Au cœur du système GlobalEye se trouve l’avion Bombardier Global 6000/6500, une plateforme canadienne offrant une grande autonomie, une grande endurance et des performances supérieures à toutes les altitudes. La proposition de Saab s’appuie sur cette plateforme éprouvée et sur une suite de capteurs et de systèmes de mission de pointe, offrant ainsi aux Forces armées canadiennes une solution hautement performante, rentable et souveraine », a fait valoir le groupe suédois, via un communiqué diffusé le 28 mai.

Le système « GlobalEye est un atout véritablement stratégique : c’est une solution qui offre une connaissance de la situation accrue et une capacité d’intervention rapide dans les domaines aérien, maritime et terrestre », a insisté Anders Carp, le directeur général adjoint de Saab.

Le GlobalEye repose sur des capteurs résilients au brouillage électronique, le radar à longue portée Erieye ER, le radar à antenne active [AESA] SeaSpray [fourni par l’italien Leonardo] ainsi que sur une boule optronique. Il permet de collecter des données dans un rayon de 400 km et de fusionner ces dernières au sein d’un système de commandement et de contrôle [C2] multi-domaines.

Reste à voir si la proposition de Saab saura convaincre la Défense canadienne… Ce qui n’a pas été le cas de l’Otan, qui lui a préféré l’E-7A Wedgetail pour remplacer les E-3A Sentry de sa Force aéroportée de détection lointaine et de contrôle de l’Otan [NAEW&C].



Auteur : Laurent Lagneau

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Cédric

Depuis 1998, je poursuis une introspection constante qui m’a conduit à analyser les mécanismes de l’information, de la manipulation et du pouvoir symbolique. Mon engagement est clair : défendre la vérité, outiller les citoyens, et sécuriser les espaces numériques. Spécialiste en analyse des médias, en enquêtes sensibles et en cybersécurité, je mets mes compétences au service de projets éducatifs et sociaux, via l’association Artia13. On me décrit comme quelqu’un de méthodique, engagé, intuitif et lucide. Je crois profondément qu’une société informée est une société plus libre.

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