Le Parlement européen adopte des surtaxes sur les engrais russes dès juillet
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Le Nouvel Obs avec AFP
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Le Parlement européen, à Strasbourg, le 11 mars 2025. ANTONIN UTZ/SIPA
Le Parlement européen a approuvé ce jeudi 22 mai une surtaxation des millions de tonnes d’engrais importées de Russie chaque année en Europe, malgré les craintes du monde agricole qui redoute une envolée des prix mondiaux.
Cette nouvelle étape dans le bras de fer entre Moscou et Bruxelles a été soutenue par une large majorité de gauche, du centre et de droite (411 pour, 100 contre et 78 abstentions), tandis que l’extrême droite s’y opposait.
Le gouvernement russe a fustigé la mesure. Les Européens « se tirent une balle dans le pied » et vont « se retrouver avec des engrais plus chers », a lancé le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov.
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Dès juillet, l’Union européenne va mettre en place des surtaxes douanières et les augmenter progressivement jusqu’en 2028, afin de couper le robinet des fertilisants azotés venus de Russie et de son allié biélorusse.
Plus de trois ans après l’invasion de l’Ukraine, il faut cesser « d’alimenter la machine de guerre » de Vladimir Poutine et « limiter la dépendance des agriculteurs européens à l’égard des engrais russes », revendique l’eurodéputée lettone Inese Vaidere (PPE, droite), rapporteure de ce texte, qui devra recevoir un ultime feu vert des Etats membres.
L’Union européenne a importé 6,2 millions de tonnes d’engrais russes en 2024 et déjà près de 2,5 millions depuis début 2025, soit un quart de ses importations en la matière.
« L’origine russe est la plus compétitive en termes de prix » et la logistique de livraisons est « bien établie », indique Dominique Dejonckheere, cadre du Copa-Cogeca, l’organisation des syndicats agricoles européens.
Empêcher la Russie de passer par ses engrais pour exporter son gaz
Avec les surtaxes, l’Europe veut empêcher la Russie de passer par ses engrais pour exporter son gaz naturel, matière première principale de fabrication de ces fertilisants azotés.
Bruxelles vise surtout une augmentation de la production européenne, pour davantage d’indépendance. La taxation des engrais russes est d’ailleurs applaudie par les industriels de l’UE.
« Le temps presse. Cela fait trois ans que nous demandons à l’UE d’agir », souligne Tiffanie Stephani, chez Yara, l’un des plus gros producteurs d’engrais en Europe. « Les importations russes ont eu un impact massif » avec une « pression » sur les prix, estime-t-elle.
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L’UE va maintenant devoir rassurer les agriculteurs qui s’alarment d’une éventuelle explosion des prix sur l’ensemble du marché. Cette taxation peut être « potentiellement dévastatrice », a lancé le Copa-Cogeca. « Les agriculteurs européens ne doivent pas devenir des dommages collatéraux » de la situation géopolitique, dit ce lobby agricole.
L’exécutif européen insiste sur la progressivité de la mesure, en trois ans. Et promet d’intervenir si les prix grimpent. En cas d’inflation, la Commission pourrait suspendre les taxes douanières sur les engrais d’autres régions pour compenser : Maghreb, Asie Centrale, Etats-Unis, Trinité-et-Tobago ou Nigeria…
La manœuvre des élus d’extrême droite
A l’extrême droite, une série d’élus ont tenté, en vain, de détricoter la proposition. La taxation des engrais russes « ne va pas changer d’un iota la guerre et est extrêmement périlleuse pour nos agriculteurs », juge l’eurodéputé Thierry Mariani (RN, Patriotes).
« C’est une usine à gaz et un suicide économique », lâche cet élu français, régulièrement pointé du doigt par ses adversaires politiques pour sa proximité avec la Russie de Vladimir Poutine.
Echaudée par la colère agricole de 2024, la Commission européenne va surveiller le sujet comme le lait sur le feu. L’exécutif a enchaîné les gestes à l’égard des agriculteurs ces derniers mois, à l’image d’un plan présenté mi-mai pour simplifier la politique agricole commune en allégeant les règles environnementales.
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