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La marine espagnole veut se doter d’un porte-avions, similaire au Charles de Gaulle – Zone Militaire

Au début de ce mois, par la voix de son chef d’état-major, l’amiral Enrico Credendino, qui ne s’est pas attardé sur les détails, la marine italienne [Marina Militare] a fait savoir qu’elle envisageait de faire construire un porte-avions à propulsion nucléaire à l’horizon 2040. Et cela qu’elle dispose actuellement des ITS Trieste et ITS Cavour, deux porte-aéronefs dotés de capacités amphibies et pouvant accueillir des chasseurs-bombardiers à décollage court et à atterrissage vertical [STOVL] de type AV-8 Harrier II et F-35B.

Les capacités aéronavales de la marine espagnole [Armada española] présente à peu près le même profil que celle de la Marina Militare, celles-ci reposant sur le porte-aéronefs Juan Carlos I ainsi que sur une douzaine d’avions EAV-8B Harrier II [ou « Matador »] que la Flotilla de Aeronaves [FLOAN] voudrait pouvoir remplacer avant 2030. Et le seul chasseur-bombardier susceptible de reprendre le flambeau n’est autre que le F-35B de Lockheed Martin. Or, à ce stade, Madrid n’a pris aucune décision sur un éventuel achat de cet appareil.

Bien que l’Espagne ait souscrit à l’engagement de porter ses dépenses de défense et de sécurité à 5 % du PIB comme les trente-et-un autres membres de l’Otan, son Premier ministre, Pedro Sanchez, a fait savoir qu’il n’avait pas l’intention, pour le moment, d’aller au-delà des 2,1 % du PIB. Ce qui lui a d’ailleurs valu de se faire admonester par Donald Trump, le président américain.

Cela étant, il se pourrait que M. Sanchez [ou son successeur] soit obligé de revoir cette trajectoire budgétaire pour les forces armées espagnoles dans la mesure où ces dernières ne manquent assurément pas d’ambition au niveau capacitaire. Du moins est-ce le cas de l’Armada española, laquelle songe aussi à se doter d’un porte-avions… mais à propulsion classique. C’est en effet ce qu’elle fait savoir, via son plan de modernisation à l’horizon 2050, qu’elle a dévoilé le 25 juin. Une étude de faisabilité aurait d’ailleurs déjà été confiée à Navantia.

Selon les médias espagnols, le porte-avions souhaité par l’Armada española aurait le même tonnage que le Charles de Gaulle [soit 42 000 tonnes], ce qui lui permettrait d’embarquer une trentaine d’avions de combat. En outre, il serait en configuration dite CATOBAR, c’est-à-dire qu’il disposerait de catapultes et de brins d’arrêt. Seront-elles à vapeur ou électromagnétiques [EMALS] ? Ce détail n’a pas été précisé pour le moment.

En outre, la marine espagnole entend aussi se doter d’un second porte-aéronefs de type Juan Carlos I, ce qui laisse entière la question du remplacement des AV-8B Matador… alors qu’elle aura aussi à se procurer des avions embarqués pour équiper le porte-avions qu’elle appelle de ses vœux.

Sur ce point, les modèles susceptibles de convenir ne sont pas nombreux. L’arrêt de la production du F/A-18 Super Hornet étant programmée par Boeing, le choix ne pourra se faire qu’entre le Rafale Marine et le F-35C. À moins que la marine espagnole envisage de se doter de la version embarquée du SCAF… Sauf que son porte-avions, s’il se concrétise, risque d’être un peu juste pour mettre en œuvre cet appareil, dont le développement n’est pas encore assuré.

Quoi qu’il en soit, un tel projet soulève plusieurs interrogations. L’Espagne n’ayant jamais possédé de porte-avions en configuration CATOBAR, la formation des pilotes de la FLOAN sera évidemment un enjeu… alors que décoller d’un porte-avions et y apponter n’est pas un « sport de masse ».

Par ailleurs, Navantia n’a pas l’expérience nécessaire pour construire un tel navire, ce qui ouvre la voie à d’éventuelles coopérations avec les États-Unis et la France. À moins que l’Espagne unissent ses efforts à ceux de la Turquie, qui, dans le cadre du programme MUGEN, a l’intention de construire un porte-avions de 60 000 tonnes… mais en configuration STOBAR [avec un plan incliné, ndlr].



Auteur : Laurent Lagneau

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Cédric

Depuis 1998, je poursuis une introspection constante qui m’a conduit à analyser les mécanismes de l’information, de la manipulation et du pouvoir symbolique. Mon engagement est clair : défendre la vérité, outiller les citoyens, et sécuriser les espaces numériques. Spécialiste en analyse des médias, en enquêtes sensibles et en cybersécurité, je mets mes compétences au service de projets éducatifs et sociaux, via l’association Artia13. On me décrit comme quelqu’un de méthodique, engagé, intuitif et lucide. Je crois profondément qu’une société informée est une société plus libre.

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