La Chine a doublé la taille de son arsenal nucléaire entre 2019 et 2025 – Zone Militaire
Selon une étude publiée ce 16 juin par l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm [SIPRI], le nombre d’ogives nucléaires détenues par les neuf puissances dotées [ou supposées l’être, comme Israël] a de nouveau diminué entre 2024 et 2025, passant de 12 405 à 12 241. Mais cette tendance est sur le point de se terminer. La remise en cause de plusieurs traités de désarmement naguère conclus entre Washington et Moscou en est une raison… Mais elle n’est pas la seule.
Pour le moment, les États-Unis et la Russie détiennent à eux seuls environ 90 % des armes nucléaires recensées dans le monde, l’arsenal de la seconde étant le plus étoffé [5 459 ogives contre 5 177]. En revanche, s’agissant des ogives déployées, c’est-à-dire prêtes à l’emploi, l’avantage va aux Américains [1 770 contre 1 718].
Cela étant, ces deux pays ont lancé de vastes programmes de modernisation de leurs forces stratégiques, comme, du reste, la France [programmes ASN4G et SNLE3G] et le Royaume-Uni.
Ainsi, la Russie a mis au point le missile balistique [ICBM] RS-28 Sarmat et a mis en service le système d’arme hypersonique Avangard. En outre, elle a lancé [ou relancé] le développement d’une nouvelle génération de missiles, comme l’Osina, l’Orechnik ou encore le Yars-M.
De leur côté, les États-Unis ont l’intention de remplacer leurs missiles balistiques intercontinentaux Minuteman III dans le cadre du programme Sentinel, leurs bombardiers stratégiques B-2 Spirit par des B-21 Raider et leurs sous-marins nucléaires lanceurs d’engins [SNLE] de la classe Ohio par ceux de la classe Columbia.
Cependant, souligne le SIPRI, les programmes de modernisation des forces stratégiques russes et américaines connaissent des difficultés techniques, industrielles et financières [le coût du programme Sentinel a augmenté de 37 %, pour s’élever à plus de 131 milliards de dollars].
Reste qu’il n’en est pas moins probable « que le déploiement d’armes nucléaires russes et américaines sera plus important dans les années à venir », estime le SIPRI.
Ainsi, « l’augmentation russe résulterait principalement de la modernisation des forces stratégiques restantes, permettant d’emporter davantage d’ogives sur chaque missile, et du rechargement de certains silos précédemment vidés », avance le SIPRI, qui décrit peu ou prou la même logique s’agissant de l’arsenal américain. Cela étant, précise l’institut suédois, ce dernier pourrait compter de « nouvelles armes non stratégiques » [donc tactiques], en réaction « aux nouveaux déploiements nucléaires chinois ».
En effet, la Chine a considérablement augmenté la taille de son arsenal stratégique au cours de ces dernières années. Selon les estimations du SIPRI, celui-ci comptait 290 armes nucléaires en janvier 2019… contre 600 actuellement. Soit une hausse de 100 % en six ans.
L’arsenal nucléaire chinois « croît plus rapidement que celui de tout autre pays, d’environ 100 nouvelles ogives par an depuis 2023. En janvier 2025, la Chine a achevé, ou était sur le point de le faire, la construction d’environ 350 nouveaux silos d’ICBM », relève le SIPRI.
Au train où vont les choses, la Chine pourrait disposer de 1 500 ogives nucléaires en 2035 et compter autant de missiles balistiques intercontinentaux que la Russie ou les États-Unis. Et cela alors que la doctrine chinoise en la matière repose notamment sur le principe de « dissuasion limitée » [ou de « stricte suffisance »]. A priori, ce n’est désormais plus le cas.
Le renforcement rapide et significatif de l’arsenal chinois pourrait conduire l’Inde à revoir aussi le sien à la hausse… Mais ce n’est pas le cas pour le moment. En janvier 2025, elle comptait 180 ogives nucléaires, contre 172 un an plus tôt.
L’Inde « aurait […] continué à développer de nouveaux types de vecteurs nucléaires. Ses nouveaux conteneurs de missiles, transportables avec des ogives associées, pourraient être capables d’emporter des ogives nucléaires en temps de paix, voire plusieurs ogives par missile, une fois ceux-ci opérationnels », affirme le SIPRI.
Quant au Pakistan, le rapport précise qu’il a « accumulé de la matière fissile, ce qui laisse penser que son arsenal nucléaire pourrait s’accroître au cours de la prochaine décennie”. Même chose pour la Corée du Nord.
En effet, le SIPRI estime que Pyongyang « possède suffisamment de matière fissile » pour produire 40 ogives nucléaires supplémentaires, ce qui lui permettrait de doubler quasiment son arsenal.
Auteur : Laurent Lagneau
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