Helen Patton, petite-fille du général Patton et Rémoise d’adoption, la ville libérée par son grand-père en 1944
Helen Patton passe une partie de son temps à Reims (Marne), la ville libérée en 1944 par son grand-père et l’armée américaine. Cette semaine, elle participera à la célébration de l’armistice du 7 mai 1945.
Helen Patton, née à Washington en 1962, n’a jamais connu son grand-père, l’illustre général américain Georges S. Patton, décédé sur une route allemande le 21 décembre 1945 après avoir, à l’été 1944, mené une offensive éclair de la Normandie à la Lorraine en passant par la Marne, libérée de l’occupant nazi par la 3e armée qu’il dirigeait. De cet ancêtre avec qui elle partage le même regard un bleu acier, Helen Patton nous confiait lors d’une précédente rencontre : « Plus j’ai grandi et plus j’ai trouvé incroyable ce qu’il avait fait durant sa vie. »
Les années ont passé et le constat demeure. Quand elle nous reçoit dans son appartement, situé à un jet de pierre de la cathédrale de Reims (Marne), où elle réside une partie de son temps, elle se révèle vite loquace à propos de cet ancêtre et de la manière dont se perpétue, aujourd’hui encore, sa mémoire : « En portant ce nom, chacun, dans ma famille, a le sentiment d’avoir une responsabilité particulière et d’aider le plus de monde possible », résume-t-elle.
En 2005, Helen Patton – fille de Georges Patton IV, qui acheva lui aussi une brillante carrière militaire au rang de général, après avoir été colonel pendant la guerre du Vietnam – crée la Patton trust, une fondation qui intervient dans le monde artistique. Quatre ans plus tard, en 2009, elle lance la Patton fundation, destinée à soutenir les veuves de guerre et vétérans américains. Depuis des décennies, Helen Patton parcourt la France et le monde, compilant des informations sur ce grand-père quatre étoiles, devenu l’archétype du héros populaire américain.
Tout, dans son propos, semble la rattacher à cette quête. Dans le Cotentin, elle a ainsi investi dans trois propriétés, parmi lesquelles une « maison spirituelle » par laquelle passa son grand-père, et une maison « notamment destinée aux vétérans blessés qui veulent visiter la Normandie ». Aussi loin qu’elle s’en souvienne, et au-delà du seul héritage patronymique, elle semble habitée par un but : « Relier les fils de l’histoire qui menacent de rompre. Beaucoup répètent : »on ne va jamais oublier ! » Mais concrètement, comment s’y prendre ? Comment faire pour ne pas oublier quelque chose qu’on n’a pas connu ? »
L’Histoire semble s’amuser à lui jouer des tours. Au début des années 1980, alors qu’elle poursuit des études d’art dramatique, elle se retrouve un soir à chanter pour l’armée américaine dans un bar en Allemagne. Elle y rencontre un jeune allemand qui, des années plus tard, en 1995, deviendra son mari. « Son grand-père avait été sauvé des Russes par mon grand-père, vous imaginez ? », nous confie-t-elle, encore incrédule. Ils auront deux enfants et divorceront « à l’amiable ». Avant cela, à la fin des années 1980, elle songe un temps à devenir nonne à l’instar de sa soeur, « qui prie chaque jour pour les soldats du monde entier », avant d’y renoncer.
Déjà, à l’époque, elle est invitée aux cérémonies liées au souvenir du second conflit mondial. Lors sa première visite à Omaha Beach, sur les plages du Débarquement, un vieux monsieur s’approche d’elle et lui demande : « Vous êtes bien la petite-fille du général Patton ?
– Oui.
– J’ai été colonel dans l’armée allemande. J’ai combattu votre grand-père en Afrique du nord. Cela a été un honneur. »
« J’aime cette histoire », dit-elle. Lors des cérémonies organisées en Normandie en juin 2014, elle reçoit la Légion d’honneur et effectue son baptême en parachute en sautant sur Utah Beach, sanglée à un vétéran US avec qui elle venait de s’éjecter un avion militaire d’époque, piloté par un autre vétéran. Durant ces années, sa route passe aussi par Reims, où elle est invitée à visiter l’atelier de maîtres-verriers Simon-Marcq.
J’ai combattu votre grand-père en Afrique du nord. Cela a été un honneur
Un ancien officier allemand, s’adressant à Helen Patton
À la fenêtre d’un appartement, elle voit un panneau « à louer ». « A l’époque, je vivais en Allemagne et n’avais pas besoin d’un nouveau logement. Mais une voix m’a dit : »Ta vie va changer. » J’ai voulu visiter l’appartement, il était déjà réservé. J’étais déçue, le vendeur m’a demandé pourquoi. J’ai juste dit : »C’est dommage, mon grand-père a libéré la ville en 1944 avec ses troupes… » Et le vendeur m’a répondu : »Alors, vous l’aurez ! » » Quelques mois plus tard est inaugurée en sa présence la rue du général Patton, dans le centre-ville de la cité des sacres.
Une décennie a passé. Cette semaine, elle figurera parmi les invités à la célébration de l’armistice du 8 mai 1945, organisée à Reims. Une évidence supplémentaire pour se souvenir de cet illustre grand-père et des tempêtes d’antan.
Auteur : Mathieu Livoreil
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