En Bref Spécial Bourget : T-REX pour Rafale F5, Airbus A400M et A330 MRTT, Saab GlobalEye, Boeing C-17 et Skydweller
Avec le salon du Bourget, l’actualité Défense a été marquée ces derniers jours par une série d’annonces industrielles, politiques et capacitaires, dont les implications méritent d’être examinées au-delà des communiqués. Si toutes ne justifient pas une analyse approfondie, plusieurs d’entre elles éclairent des dynamiques lourdes en matière d’autonomie, d’innovation ou de projection.
Ainsi, Safran a confirmé que son turboréacteur M88 T-REX équipera bien le Rafale F5, consolidant un jalon essentiel de l’évolution de l’appareil tout en assurant la préservation du savoir-faire national en propulsion. En parallèle, la France et l’Espagne ont trouvé un accord pour maintenir active la ligne d’assemblage de l’A400M à Séville jusqu’en 2029, et renforcer son potentiel capacitaire dans le segment stratégique, alors que, dans le même temps, Airbus anticipe la hausse des cadences de livraison de ravitailleurs A330 MRTT, pour répondre aux besoins émergents.
Toujours à Paris, le ministère des Armées a confirmé sa préférence pour l’avion-radar suédois GlobalEye, ouvrant la voie à une refonte de la posture française d’alerte avancée, et marquant une inflexion vers une filière de souveraineté européenne dans le segment AWACS.
Dans ce même contexte de compétitions capacitaires, Eurofighter a annoncé son intention de doubler la production annuelle du Typhoon, en réponse à une demande européenne et export encore incertaine — une annonce à lire aussi comme un contre-discours face à la montée en cadence de Dassault. Plus en amont, Thales a dévoilé une coopération avec Skydweller Aero autour d’un drone solaire haute altitude, capable d’assurer une surveillance maritime permanente sur des zones critiques, et potentiellement amené à renforcer les dispositifs SURMAR autour des câbles et routes sous-marines.
Enfin, Boeing a reconnu être en discussion pour relancer la production du C-17 Globemaster III, alors que les besoins en logistique lourde augmentent en dehors du soutien américain. Une possible renaissance industrielle qui pourrait rebattre les cartes dans le segment stratégique lourd à l’horizon 2030.
Le turboréacteur T-REX équipera bien le Rafale F5
Longtemps discret, parfois même considéré comme incertain, le programme de turboréacteur T-REX développé par Safran vient de franchir une étape décisive. À l’occasion du Salon du Bourget 2025, les représentants du motoriste français ont confirmé que ce dérivé survitaminé du M88 équipera bien le futur standard F5 du Rafale, actuellement en phase de développement avancé chez Dassault Aviation. Cette annonce confirme une évolution attendue, mais jusqu’ici non formellement actée, de la chaîne propulsive du chasseur français, et constitue un jalon majeur dans l’évolution du programme Rafale à l’horizon 2030.
L’existence du programme T-REX a été rendue publique pour la première fois à l’automne 2024, à l’occasion d’auditions parlementaires sur le suivi de la Loi de Programmation Militaire. Les responsables de Safran y avaient expliqué travailler sur une évolution profonde du M88, destinée à en améliorer significativement les performances — notamment avec un objectif d’augmentation de poussée de 20 %, à dimensions et masse constantes. Officiellement, le moteur reste dans l’enveloppe physique du M88-4E, mais intègre des matériaux plus résistants, une chambre de combustion optimisée, un nouveau système de régulation numérique à haut rendement — tout en augmentant la puissance électrique disponible à bord, pour alimenter les nouveaux systèmes et le traitement numérique largement accru de l’appareil.
D’un point de vue technique, cette évolution est capitale pour accompagner le Rafale vers son standard F5. L’intégration d’un moteur plus puissant est largement considérée comme indispensable pour compenser l’alourdissement prévisible du chasseur, lié à l’ajout de nouveaux capteurs (radar AESA à balayage étendu, système de guerre électronique, traitement collaboratif de données), d’une connectivité augmentée, et de la mise en œuvre future de drones de combat légers, prévus dans l’architecture Rafale. Une augmentation de poussée de 20 % permettrait ainsi de préserver, voire d’améliorer, le rapport poussée/masse du Rafale, garant de sa manœuvrabilité et de sa capacité de survie face à des adversaires de nouvelle génération.
Mais derrière cette justification opérationnelle se cache un autre enjeu, plus stratégique : la préservation du savoir-faire industriel national en matière de motorisation de chasse. Le programme SCAF, censé porter un nouveau moteur de génération 6 développé par Safran et MTU Aero Engines, a pris un retard considérable. Dans ce contexte, le T-REX apparaît comme un garde-fou : un moteur intermédiaire, directement utilisable sur le Rafale, et permettant à Safran de maintenir ses compétences critiques en propulsion militaire, en attendant un hypothétique déblocage du SCAF.
Le problème, cependant, est que le programme T-REX ne figure dans aucun des financements prévus par la Loi de Programmation Militaire 2024–2030. Sa prise en charge relève donc, à ce stade, probablement des investissements propres de Safran. Seule une réintégration du programme dans une trajectoire budgétaire étatique claire permettrait de garantir qu’il puisse accompagner l’entrée en service du Rafale F5 à l’horizon 2030.
La France et l’Espagne sauvent la ligne de production de l’A400M jusqu’en 2029
Menacée de fermeture depuis plusieurs mois en raison du désengagement progressif de plusieurs clients export — notamment l’Allemagne, qui a réduit ses volumes initiaux — la ligne d’assemblage final de l’A400M, implantée à Séville, en Espagne, vient de bénéficier d’un sursis décisif. À l’occasion du Salon du Bourget 2025, la France et l’Espagne ont signé une lettre d’intention visant à étaler leurs commandes d’A400M sur plusieurs années supplémentaires, afin de garantir l’activité de la chaîne de production jusqu’à fin 2028, voire 2029.
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Auteur : Fabrice Wolf
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