« Des hordes de gens affamés » : un entrepôt du Programme alimentaire mondial pillé à Gaza
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Le Nouvel Obs avec AFP
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De nombreux Palestiniens se ruent dans un centre du Programme alimentaire mondiale à Deir el-Balah dnas la Bande de Gaza, le 28 mai 2025. EYAD BABA / AFP
Des milliers de Palestiniens affamés ont pillé mercredi 28 mai au soir un entrepôt du Programme alimentaire mondial (PAM) de Gaza, au lendemain d’une distribution d’aide chaotique dans l’enclave dévastée par la guerre entre Israël et le Hamas.
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Selon des images tournées par l’AFP, la foule n’a rien laissé, emportant sacs de nourriture, palettes de bois ou encore madriers alors que des tirs retentissaient. « Des hordes de gens affamés ont fait irruption dans l’entrepôt […] à la recherche de produits alimentaires qui avaient été prépositionnés en vue d’être distribués », a déploré le PAM dans un communiqué appelant à un « accès humanitaire sûr et sans entraves ».
Le communiqué indique que le PAM essaie de confirmer des informations faisant état de deux morts et plusieurs blessés au cours de l’incident. « Le PAM n’a cessé de mettre en garde sur la détérioration de la situation, […] et les risques que font peser la limitation de l’aide humanitaire à des gens affamés ayant un besoin désespéré d’assistance », ajoute le texte.
Israël a partiellement levé la semaine dernière le blocus total de l’aide à Gaza imposé depuis le 2 mars, officiellement pour contraindre le Hamas à relâcher ses derniers otages. Depuis, le pays dit avoir laissé passer plusieurs centaines de camions humanitaires.
Distribution chaotique
Mardi, une distribution chaotique a fait 47 blessés dans un centre de la Fondation humanitaire de Gaza (GHF) – une nouvelle organisation créée avec le soutien d’Israël et des Etats-Unis, qui a mis en place un système que l’ONU juge contraire aux principes humanitaires.
« Toutes les boîtes d’aide ont été déchiquetées et chacun prenait ce qu’il voulait », raconte un habitant, Qasim Chalouf, qui a pu s’emparer de « cinq sacs de pois chiches et cinq kilos de riz ».
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« Environ 47 personnes ont été blessées », « la plupart par balles », tirées par l’armée israélienne, selon le Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme dans les Territoires palestiniens occupés.
L’armée israélienne a reconnu des « tirs de sommation en l’air » de ses soldats, « à l’extérieur » du centre de la GHF, mais « en aucun cas vers les gens ». La GHF a aussi démenti tout tir vers la foule.
Passe d’armes entre l’ONU et Israël
L’ambassadeur israélien à l’ONU Danny Danon a attribué devant le Conseil de sécurité la responsabilité de ce chaos au Hamas, l’accusant d’avoir tenté de « bloquer » l’accès au centre de distribution avec des barrages routiers. Et « l’ONU a maintenant activement rejoint le Hamas pour tenter de bloquer cette aide », a-t-il affirmé. « L’ONU utilise les menaces, l’intimidation et les représailles contre les ONG qui ont choisi de participer au nouveau mécanisme humanitaire », a-t-il ajouté.
Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général de l’ONU, a redit mercredi le refus des Nations unies de travailler avec la nouvelle fondation, dont les opérations, affirment-ils, « ne respectent pas nos principes humanitaires ». Il a également assuré que l’ONU faisait tout son possible pour récupérer l’aide arrivée via le point de passage de Kerem Shalom.
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« Depuis la semaine dernière, environ 900 camions ont été soumis à l’accord d’Israël, 800 ont été approuvés mais seulement 500 ont pu être déchargés côté israélien de Kerem Shalom et encore moins ont pu passer côté palestinien, où nous et nos partenaires avons pu collecter un peu plus de 200 d’entre eux, freinés par l’insécurité et un accès restreint », a déclaré Stéphane Dujarric.
« Si nous ne pouvons pas collecter ces biens, je peux vous dire une chose, ce n’est pas parce que nous n’essayons pas », a-t-il martelé.
« La mort continue »
A Gaza, Bassam Daloul, 40 ans, ne voit aucun espoir : « Six cents jours ont passé et rien n’a changé. La mort continue et les bombardements israéliens n’arrêtent pas ».
Sur le terrain militaire, le Premier ministre Benjamin Netanyahou a affirmé mercredi qu’Israël avait tué Mohammed Sinouar, considéré comme le chef du Hamas à Gaza. Selon des médias israéliens, il a été visé par une frappe israélienne le 13 mai à Khan Younès, dans le sud de Gaza. La Défense civile de l’enclave a par ailleurs fait état de 16 personnes tuées par des frappes israéliennes mercredi.
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A Tel-Aviv, des milliers de personnes se sont rassemblées mercredi soir pour réclamer un cessez-le-feu avec le Hamas qui permettrait la libération des otages.
L’attaque du 7 octobre a entraîné la mort de 1 218 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP établi à partir de données officielles. Sur 251 personnes alors enlevées, 57 restent retenues à Gaza, dont au moins 34 mortes, selon les autorités israéliennes.
Plus de 54 084 Palestiniens, majoritairement des civils, ont été tués par la campagne de représailles israéliennes, selon des données du ministère de la Santé du Hamas, jugées fiables par l’ONU.
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