Attendu par l’armée de Terre depuis 2016, le drone Patroller a encore des « difficultés techniques de mise au point » – Zone Militaire
En 2016, le drone tactique Patroller fut retenu par le ministère des Armées au titre du programme SDT [Système de drones tactiques] mené au profit de l’armée de Terre. Et cela aux dépens du Watchkeeper de Thales UK, que la British Army s’apprête à remplacer dans le cadre du projet Corvus.
Un contrat, d’une valeur de 330 millions d’euros, fut notifié à Safran. Il prévoyait la livraison, à partir de 2018, de deux SDT opérationnels, composés chacun de cinq Patroller et de deux stations au sol ainsi que celle d’un système dédié à la formation, comprenant quatre autres drones. Le maintien en condition opérationnelle [MCO] pour une durée de 12 ans faisait aussi partie du marché.
Pour rappel, développé à partir du motoplaneur allemand Stemme S15, le Patroller est censé pouvoir voler à 20 000 pieds d’altitude pendant 20 heures. Potentiellement armé, il est équipé d’une boule optronique Euroflir 410, d’une nacelle de désignation laser, d’une charge de guerre électronique et d’un radar PicoSAR AESA, fourni par l’italien Leonardo.
Seulement, les échéances de ce programme ne purent pas être tenues. En décembre 2019, un Patroller fut perdu lors d’un vol de réception industrielle, en raison de la défaillance d’un calculateur de commandes de vol d’origine américaine. Ce qui obligea l’industriel à revoir sa copie et mener de nouvelles campagnes d’essais. « Nous attendons les premières livraisons fin 2022 avec dix appareils sur les quatorze prévus », s’était alors risqué à dire Joël Barre, alors Délégué général pour l’armement [DGA], lors d’une audition parlementaire.
En décembre 2022, l’armée de Terre fit savoir que le 61e Régiment d’Artillerie [RA] allait entrer en « phase d’appropriation » du drone Patroller… Et, quelques semaines après, la Direction générale de l’armement [DGA] certifia le drone de Safran, ce qui ouvrait la voie à une capacité opérationnelle initiale. Puis, la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 porta à vingt-huit le nombre de drones tactiques devant être acquis.
Sauf que les dix Patroller attendus en 2022 se faisaient alors encore attendre. Le premier drone tactique de série ne fut finalement livré à la DGA qu’en mai 2024. On aurait pu penser que les autres allaient suivre. Il n’en a rien été… D’ailleurs, le programme SDT n’a plus fait parler de lui par la suite.
La raison vient d’être donnée dans la partie concernant le programme 146 « Équipement des forces » du Rapport annuel de peformances [RAP], annexé au projet de loi relative aux résultats de la gestion
et portant approbation des comptes de l’année 2024, que vient de publier le ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique.
« La progression dans la réalisation des équipements en 2024 atteint 62,7 % pour un objectif inscrit aux Projets annuels de performances [PAP] 2024 de 85 %. Ce résultat est en régression de 2,1 points par rapport à l’année précédente [64,8 % en 2023] » et « demeure en deçà des objectifs que s’assignent les responsables de programme pour les systèmes de forces ‘Commandement et maîtrise de l’information’, ‘Engagement et Combat’ et ‘Protection et sauvegarde’ « , avance ce document.
Et cela à cause de « retards ou de non-conformités industrielles ou de négociations complexes », précise-t-il. Parmi les programmes concernés figure le drone Patroller. Ainsi, neuf appareils n’ont pas pu être livrés en 2024 et la commande pour les quatorze exemplaires supplémentaires n’a pas été passée en conséquence.
« Le décalage des livraisons du SDT est essentiellement dû à des difficultés techniques de mise au point. Cela a conduit également à décaler la commande de vecteurs supplémentaires », explique le RAP.
« Les premières commandes de l’étape 2 et l’acquisition d’équipements de mission complémentaire n’ont pas été effectuées en raison de difficultés techniques de mise au point », insiste-t-il, en évoquant par ailleurs des « hausses économiques ».
Reste à voir quand ces « difficultés techniques », dont le détail n’a pas été précisé, seront surmontées. En attendant, cela fait maintenant près de dix ans que ce le programme SDT est entré en phase de réalisation, ce qui a en partie conduit l’armée de Terre à retirer du service ses anciens drones tactiques Sperwer.
Auteur : Laurent Lagneau
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